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aujourd'hui, je t'ai engendré

aujourd'hui, je t'ai engendré

Publié par Incarnare le jeudi 21/01/2010 - 00:44 - Blog

Chose promie, chose due. Ce billet abordera cette phrase -quelque peu énigmatique- de l'évangile du baptême du Christ : « aujourd'hui, je t'ai engendré ».

Se recevoir, comme créature

Je regardais ce soir un débat, sur la chaîne parlementaire (sans doute bientôt diffusé ici), sur la bioéthique. On y parlait notamment de don de gamètes, dans le cadre de l'AMP, et du bien-fondé de l'anonymat des donneurs de sperme. Participait un internaute qui revendiquait le droit de rencontrer son père biologique et s'offusquait -de manière très forte- de l'opposition qu'on lui manifestait, qualifiée par lui d'atteinte à la dignité humaine. 

Son émotion est compréhensible, car il a choisi de fonder une grande partie de son existence sur cette quête, et sur un droit à connaître ses origines. Sa situation est toutefois banalement identique à celle de milliers de personnes qui ont des doutes sur leur filiation. Il est d'ailleurs intéressant -mais hors sujet ?- de voir que c'est dans une société qui rejette la stabilité de la famille en attaquant le mariage que surgit cette question.

Que l'on connaisse ses parents biologique ou non, que l'on soit un enfant naturel, légitime, adopté, etc., nous partageons tous une réalité : nous n'avons pas choisi d'exister et nul ne nous a demandé notre approbation sur qui l'on sera ou dans quel contexte l'on vivra. On ne s'installe pas dans sa vie comme dans un appartement. Nous passons tous notre vie à essayer d'expliquer, justifier, nous approprier, ce moment que nous n'avons pas contrôlé, qu'est notre naissance. Le fait est que nous ne nous appartenons pas.

Certains réagissent par la révolte à cette réalité ; d'autres la considèrent comme une calamité1. Nous sommes créatures ; et face à la grandeur du Créateur, nous avons instinctivement deux craintes.

La première est la cette crainte de Dieu, qui est don de l'Esprit, qui nous pousse à vouloir plaire à Dieu. Si Dieu est Amour, cette "crainte" est bonne. Mais vient tout de suite la seconde : comment celui qui nous a fait peut-il nous regarder avec bienveillance ? Cette deuxième crainte est complètement viciée et est le protoype du péché, qui s'auto-alimente : parce que nous nous savons imparfaits (et que l'accusateur le sussure à notre coeur), nous ne pouvons croire qu'un Bien absolu puisse nous aimer ; la toute-puissance de Dieu est alors insupportable : nous Le rejetons. Comme je le disais dans mon dernier billet, dès que nous doutons de l'amour de Dieu, nous sommes cuits.

Dès avant ta naissance...

Cette rébellion a deux caractéristiques : tout d'abord elle est inutile. Notre Créateur nous dit d'être sans crainte. « Ainsi parle le Seigneur qui t'a fait, qui t'a formé dès le sein maternel, et qui est ton appui : Sois sans crainte »2. Dans notre combat vers le Bien, le Bien n'est pas l'accusateur ; il est notre appui.3

Ensuite, elle est absurde : si nous sommes si petits, qui peut bien signifier notre rébellion ? 

  Malheur à qui discute avec celui qui l'a modelé, vase parmi les vases de terre! L'argile dit-elle à son potier : " Que fais-tu ? ton œuvre n'a pas de mains! "
Malheur à qui dit à un père : " Pourquoi engendres-tu ? " et à une femme : " Pourquoi mets-tu au monde ? "
Ainsi parle Yahvé, le Saint d'Israël, son créateur : On me demande des signes au sujet de mes enfants, au sujet de l'œuvre de mes mains, on me donne des ordres. 4

Enfin, elle est infertile. Ou plutôt, elle ne produit que le mal, car nous mettons Dieu à l'épreuve et en le rejetant, nous créons immédiatement des idoles.

 Rassemblez-vous et venez! Approchez tous ensemble, survivants des nations! Ils sont inconscients ceux qui transportent leurs idoles de bois, qui prient un dieu qui ne sauve pas.
Annoncez, produisez vos preuves, que même ils se concertent! [...] Il n'y a pas d'autre dieu que moi. Un dieu juste et sauveur, il n'y en a pas excepté moi.
Tournez-vous vers moi et vous serez sauvés, tous les confins de la terre, car je suis Dieu, il n'y en a pas d'autre.5

Comme preuve de l'amour dont il nous a comblés...

...il nous a envoyé son Fils. Sa mère, Marie, a elle aussi été un peu "sonnée" par la nouvelle. L'ange lui a dit également « sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu »6. Et elle a contribué à nous ouvrir un peu le Salut en ne laissant pas se développer dans son coeur cette deuxième crainte, insidieuse, mais en se donnant avec humilité, dans la foi. Fiat! « Voici, je suis la servante du Seigneur, qu'il me soit fait selon ta parole ».

Ainsi Jésus, présent de toute éternité en Dieu, se fait homme. « Avant qu'Abraham n'était, je suis.» dit le Christ. Il n'est plus possible en entendant ça de ranger Jésus dans la case des maîtres à penser : soit il est Dieu, soit il est fou. 

Contemplons encore ce mystère , nous qui avions peur de la toute-puissance de Dieu. Il vient nous prouver l'inverse en se faisant tout-petit, jusqu'à choisir cet instant que l'on ne choisit pas, la naissance, dans des conditions que notre internaute ci-dessus qualifierait sans doute d'atteinte à la dignité humaine : dans une mangeoire

Quand les cieux se déchirent pour crier « aujourd'hui, je t'ai engendré » à quelqu'un qui existait de toute éternité, je me dis que si cette voix de fit entendre, c'était pour que nous les entendions. Ce n'était pas une sorte de révélation personnelle, adressée au Christ. Voici qu'il nous dit : toi Israël, toi, homme ou femme créé(e), aujourd'hui je t'engendre, je fais de toi une créature nouvelle, mon fils adoptif, ma fille adoptive.

Co-naître à l'amour

Paul Claudel disait "la connaissance explique la naissance, toute substance implique sa preuve", dans le Traité de la co-naissance au monde et à soi-même. En Jésus, Dieu veut nous connaître (au sens biblique, c'est à dire dans toutes les dimensions de notre être), nous habiter7.

Il nous invite à co-naître, c'est à dire naître avec. Avec lui. Il veut que nous soyons partenaires de l'Absolu.

Celui qui nous connaissait dès avant notre naissance, nous révèle que dès ce jour, il nous avait honorés. A Isaïe, il disait « je suis Yahvé, celui qui t'appelle par ton nom, le Dieu d'Israël. [...] je t'ai appelé par ton nom, je te donne un titre, sans que tu me connaisses.8 » Avec Jésus, il veut se laisser connaître par nous. Dieu nous offre sa main.

Car nous voyons, à présent, dans un miroir, en énigme, mais alors ce sera face à face. A présent, je connais d'une manière partielle ; mais alors je connaîtrai comme je suis connu9.

  • 1. comme Noctuel qui disait "la naissance est un péché de jeunesse dont la vie constitue la pénitence".. autant dire que la vision de l'académcien était pleinement non-chrétienne
  • 2. Is 44,2
  • 3. Je ne peux pas m'empêcher de vous citer encore ce magnifique passage d'Isaïe :
    Je t'ai modelé, tu es pour moi un serviteur, Israël, je ne t'oublierai pas. J'ai dissipé tes crimes comme un nuage et tes péchés comme une nuée; reviens à moi, car je t'ai racheté.
    Criez de joie, cieux, car Yahvé a agi, hurlez, profondeurs de la terre, poussez, montagnes, des cris de joie, forêt, et tous les arbres qu'elle contient! car Yahvé a racheté Jacob, il s'est glorifié en Israël.
    Ainsi parle Yahvé, ton rédempteur[...]qui confirme la parole de mon serviteur et fais réussir les desseins de mes envoyés; qui dis à Jérusalem : " Tu seras habitée ", et aux villes de Juda : " Vous serez rebâties et je relèverai les ruines de Jérusalem "
  • 4. Is 45,9-11
  • 5. Is 45,20-22
  • 6. cf. Lc 1,30
  • 7. c'est moi qui dis à Jérusalem : "tu seras habitée"
  • 8. Is 45,3-4
  • 9. 1Co 13,12

 
 

 
 

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La presse se fait l'écho d'un livre du journaliste Ekke Overbeek indiquant que Karol Wojtyła, futur Pape Jean-Paul II (et aujourd'hui Saint Jean-Paul II) aurait avant son élection pontificale, en tant qu'archevêque de Cracovie, eu connaissance de témoignages de faits de pédo-criminalité (la presse ne relaie ni le nombre ni la nature des faits) et n'aurait pas apporté la réponse appropriée (à savoir le signalement des faits aux autorités civiles et le déclenchement d'une enquête canonique aboutissant au renvoi à l'état laïc des malfaiteurs).