Parler, écouter et faire silence
La salle de presse du Vatican a publié aujourd'hui une lettre circulaire "pour aider les Conférences épiscopales à établir des Directives pour le traitement des cas d’abus sexuel commis par des clercs à l’égard de mineurs"1. Le texte est d'une rare qualité, subtil équilibre entre l'exigence de procédures et la nécessité de l'accueil des victimes avec humanité.
Du devoir d'être humain - une institution plus attentive aux personnes
Le premier devoir de l'Église est d'accueillir les victimes. Ainsi, les démarches de Benoît XVI auprès des victimes d'abus sexuels n'est pas d'abord une posture de communication, mais un exemple à ses frères évêques. Toutefois, cette démarche personnelle n'exclut ni les procédures, ni les structures destinées à prévenir les actes et accompagner les victimes.
Nombreux sont ceux qui, dans l'Eglise, refusent toute procédure (dans ce domaine comme dans d'autres) au nom d'une approche humaine et individuelle. Les aspects légaux et procéduraux de la lettre du Cardinal Levada démontrent l'inverse, en instituant une véritable obligation de moyens pour prévenir les abus et venir en aide aux victimes.
De fait, une institution désorganisée a toutes les chances d'être écrasante et de broyer par son inertie les personnes qui l'approchent, notamment celles qui sont en position de fragilité. C'est principalement sur cette question des moyens qu'on attendra Conférence des évêques de France d'ici 2012.
Cinq points sont mentionnés explicitement dans la lettre :
- l'accompagnement des victimes
- la protection des mineurs
- la formation des clercs
- l'accompagnement des prêtres2
- la coopération avec les autorités civiles
Accueillir. Mais parler, ou se taire ?
Encore aujourd'hui, des évêques ne manifestent pas leur souci des victimes, et ne prennent pas concrètement le temps de les accueillir, préférant la fuite ou la dénégation, souvent par peur. Cependant, pour ceux qui désirent leur offrir leur aide, se pose une question : que faut-il dire ? Que dire a un homme, ou une femme, qu'un prêtre a abusé dans son enfance ou sa jeunesse ?
Aucune procédure ne peut se substituer ici aux qualités humaines de l'évêque, ni à la providence ; une mécompréhension, un geste mal interprétés, sont toujours possibles. Mais là, dans ce dialogue en tête à tête, s'échangent les souffrances ; là, la puissance de La Croix peut guérir et transformer.
A lire :
- cet article, douloureux mais lumineux, de Bruno Bouvet et Céline Hoyeau, dans la Croix. Ils ont pu interroger des hommes et des femmes victimes de la pédophilie sur la difficulté de leur parcours ultérieur avec l'Eglise.